Projet Intercropvalues : chronique du rendez-vous annuel
Cultures associées
Projet INTERCROPVALUES
Publié le
Les 1, 2 et 3 octobre 2025, les partenaires du projet Intercropvalues se sont réunis pour la troisième année de consortium, cette fois-ci en Ecosse, au Collège Rural (SRUC). L’occasion de partager l’avancée des travaux de ces trois premières années.
Partager l'article :
Le Projet Intercropvalues en bref
Pour rappel, le projet Intercropvalues vise à exploiter les avantages des cultures associées pour concevoir et gérer des systèmes de culture productifs, diversifiés, résilients, rentables et respectueux de l’environnement, acceptables pour les agriculteurs et acteurs de la chaîne agroalimentaire. Il développe à la fois une action de recherche scientifique pour mieux comprendre et modéliser le fonctionnement intime des intercultures et une analyse détaillée des verrous et leviers au niveau de la filière pour identifier des solutions crédibles pouvant être adoptées par les agriculteurs et les acteurs de la filière.
La mise en œuvre de ce projets d’envergure s’appuie sur un réseau de 13 cas d’étude de co-innovation (CICS), situés au Danemark, en Suède, au Royaume-Uni, en France, en Allemagne, en Espagne, en République serbe, en Italie, au Mozambique et en Suisse. L’un des cas d’étude français est un groupe d’agriculteurs de la région angevine, accompagné par l’Union des Cuma Pays de la Loire, le GABB Anjou, l’INRAE, la FRCuma Ouest et la FNCuma.
Des agroéquipement au service des mélanges d’espèces
Cette réunion a également été l’occasion pour nos collègues chercheurs Laurent Bedoussac et Chloé Salembier de partager leurs travaux sur les logiques de gestion du parc matériel des agriculteurs et les processus de conception à la ferme.
Contexte de l’étude
La transition vers des systèmes agricoles durables nécessite de prendre en compte la diversité des agriculteurs et des situations agricoles et de considérer que les agriculteurs expérimentent de nouvelles pratiques, étape par étape, souvent sur une longue période.
Pour autant, peu d’attention a encore été accordée aux mélanges d’espèces du point de vue des équipements agricoles ainsi qu’à la relation entre les changements de pratiques et les équipements agricoles.
L’accès à des équipements agricoles adaptés est souvent présenté comme un obstacle à la diversification et au développement des mélanges : les équipements agricoles existants peuvent être inadaptés aux usages locaux, les coûts peuvent être dissuasifs et l’entretien contraignant.
Compte tenu de ce contexte, nos partenaires chercheurs se sont proposés d’étudier comment les agriculteurs gèrent leurs équipements agricoles pour mettre en œuvre différents mélanges d’espèces adaptés à leur situation et de tirer des enseignements sur la manière dont les agriculteurs (re)conçoivent leurs parcs d’équipements agricoles lorsqu’ils expérimentent progressivement les mélanges de cultures.
Deux questions de recherche
Pour mener à bien cette étude, deux travaux complémentaires ont été conduits avec deux questions spécifiques, à savoir :
Explorer les logiques de gestion des équipements pour les mélanges d’espèces : perspectives issues de l’agronomie
Quelles sont les logiques de gestion des équipements agricoles des agriculteurs pour cultiver différents mélanges d’espèces dans leur situation ?
Conception du parc d’équipements agricoles par les agriculteurs dans un contexte de transition : le cas des mélanges d’espèces
Comment les agriculteurs s’approprient-ils progressivement la pratique du mélange d’espèces et comment (re)conçoivent-ils leur parc d’équipements agricoles au cours de ce processus ?
Ces travaux, menés respectivement par Esther Fouillet et Hadrien Pham, sur la base de 29 entretiens d’agriculteurs au total, font l’objet d’articles scientifiques soumis à la revue Agronomy for sustainable development en 2025.
3 résultats illustrant les logiques de gestions des agroéquipements adaptés aux cultures associées
Résultat 1 : Caractérisation des mélanges d’espèces à travers le prisme des équipements agricoles
Selon les agriculteurs, la disposition spatiale et la profondeur de semis sont les deux principales caractéristiques des mélanges d’espèces qui interagissent avec les équipements agricoles. Il en résulte six types de méthodes de semis selon que les espèces sont semées en rang alterné, sur le même rang ou avec l’une au moins des espèces semées à la volée, croisée avec la profondeur de semis, identique ou différente pour les espèces semées.
Résultat 2 : Trois logiques de gestion pour le parc d’équipements agricole
Les enquêtes réalisées auprès d’agriculteurs ont permis d’identifier trois types :
Type A : minimiser les coûts de mécanisation en réutilisant le matériel agricole existant.
Par exemple, le semis d’un mélange de tournesol – luzerne – trèfle, en combinant un microgranulateur et un semoir monograine. Dans cet exemple, seul le tournesol est récolté, il n’y a pas de tri.
Type B : semer des mélanges en fonction des caractéristiques des espèces en adaptant le matériel.
Par exemple, le semi d’un mélange blé – féveroles avec un semoir de semis direct et cloisonnement de la trémie (adaptation réalisée par l’agriculteur). Dans cet exemple, la récolte se fait avec une moissonneuse-batteuse axiale et le tri est réalisé en prestation (nettoyeur-séparateur).
Type C : choisir les mélanges d’espèces et le matériel en fonction des ressources disponibles localement.
Par exemple, le semis au DP12 (épandeur d’engrais) de mélanges orge – lentille ; épeautre – trèfle ; blé – féverole. La récolte est réalisée via une diversité d’équipements de récolte qui s’adaptent aux spécificités des mélanges (en prestation). Le tri est réalisé via la chaîne de tri du nettoyeur-séparateur au tri optique (en prestation).
Ces deux premiers résultats sont détaillés dans le poster d’Esther Fouillet sur les Logiques de gestion des agroéquipements pour les mélanges d’espèces, ici :
Résultat 3 : Trois approches pour la conception d’équipements agricoles permettant de cultiver des mélanges à long terme
Conception frugale pour tester différents mélanges d’espèces Cette approche présente un compromis entre l’acquisition d’agroéquipements et la prestation de services pour trier les mélanges. Elle repose sur la transformation des équipements existants, des achat d’occasion et le recours à des prestataires de services pour différentes méthodes de semis.
Conception standardisée pour optimiser la production à grande échelle d’une gamme de mélanges Cette approche repose sur l’acquisition d’une large gamme d’équipements agricoles de tri et de récolte disponibles pour la production à grande échelle de mélanges d’espèces. Il s’agit de transformer la gamme d’équipements agricoles en acquérant des semoirs afin de soutenir le développement d’espèces mixtes sur de grandes surfaces.
Conception flexible pour pratiquer une diversité de mélanges Cette approche repose sur l’acquisition progressive d’une gamme de trieurs pour une gestion autonome et flexible des mélanges d’espèces, de la production au traitement. Il s’agit de concevoir la flexibilité des équipements de semis au fil du temps, en donnant la priorité à la transformation des équipements existants.
Pour nos partenaires, les équipements agricoles sont essentiels pour permettre aux agriculteurs de développer des mélanges d’espèces et ne constituent pas des « obstacles » au développement des mélanges d’espèces : les agriculteurs modifient, réutilisent, bricolent, construisent eux-mêmes ou achètent individuellement ou collectivement des équipements agricoles afin de pouvoir tester les mélanges d’espèces et les repenser étape par étape.
Les résultats de ces travaux enrichissent notre regard sur les mélanges d’espèces et les typologies existantes. Ces travaux seront poursuivis en 2026, avec l’étude de l’utilisation collective des machines. Le réseau Cuma a un rôle important de soutien à l’appropriation des mélanges d’espèces dans différentes situations, en particulier pour les outils de tri.
4 notes d’orientation, à l’attention des pouvoirs publics
Au delà des agroéquipement, le projet Intercropvalues cherche à promouvoir le développement des cultures associées en s’appuyant entre autre sur quatre notes d’intention, dont l’objectif est multiple :
Promouvoir le développement de chaînes de valeur coordonnées et adaptées aux cultures associées.
Renforcer la participation des parties prenantes à l’élaboration des politiques.
Assurer la cohérence entre les objectifs et les instruments politiques.
Accroître et faciliter l’accès au soutien financier pour tous les acteurs impliqués dans les chaînes de valeur des cultures associées.
Deux des quatre notes d’orientations prévues sont déjà disponibles, la première sur la manière de concevoir des politiques favorables aux cultures associées à partir des leçons tirées de l’analyse des obstacles aux cultures associées en Europe et la deuxième sur les recommandations à l’intention des décideurs politiques de l’UE et des États membres pour stimuler les cultures associées dans la PAC après 2027.
Les cultures associées sont au cœur du projet européen Intercropvalues. Malgré les bénéfices pour la biodiversité, la résilience et l’autonomie protéique, leur développement reste freiné par de nombreux verrous que la note d’orientation détaille et cherche à lever.
Cette note d'orientation propose six recommandations pour intégrer pleinement les cultures associées dans la PAC post-2027.
Valorisation des cultures associées : une histoire de proportion
L’une des actions du projet Intercropvalues est de tester l’acceptabilité pour les consommateurs de produits alimentaires incluant une part de légumineuses. Une dégustation de pain avait déjà été réalisée en Allemagne en 2024, incluant une proportion variable de farine de pois.
Cette année, une dégustation de biscuits a été organisée, pour lesquelle la proportion de farine de blé et de lentille variait : le biscuit 533 contenait 100% de farine de blé, le biscuit 120 contenait 85% de farine de blé et 15% de farine de lentille, le biscuit 179 contenait 75% de farine de blé et 25% de farine de lentille, et le biscuit 376 contenait 65% de farine de blé et 35% de farine de lentille.
Votre serviteuse s’est prêtée au jeu de la dégustation à l’aveugle, et les résultats sont assez nets : si l’on ne peut pas deviner quelle farine est utilisée (aucun goût particulier ne permet de reconnaitre la lentille), passé les proportions 85% blé – 15% lentille, le biscuit est de plus en plus salé, moins satisfaisant. Une histoire de proportion, donc, que les partenaires continuent de travailler pour favoriser la valorisation des légumineuses.
Rendez-vous dans les champs
Jeudi 2 octobre, les plus courageux ont chaussé bottes et imperméables pour visiter de la ferme Mungoswells d’Angus McDowell.
Angus est diplômé en génie agricole depuis environ 40 ans. Sa ferme s’étend sur 230 hectares et bénéficie d’un sol fertile, entièrement cultivable. 40 % de la ferme est en agriculture biologique (depuis 2000), le reste étant exploité de manière conventionnelle, où il cultive des céréales (blé de printemps et orge de printemps), des pommes de terre et du trèfle.
Angus dispose d’un atelier de transformation sur place, afin d’ajouter une valeur plus haut de gamme aux céréales : un moulin à farine (anciennement récupéré de l’armée suisse) est utilisé pour produire de la farine pour la fabrication d’un pain riche en protéines et de la farine ordinaire pour la pâtisserie. Celle-ci est vendue en boulangeries artisanales, restaurants ou magasins de ferme et en partie en ligne et à la ferme. Angus possède également une petite malterie qui vend du malt aux microbrasseries et aux distilleries.
Un agriculteur (et meunier, et commercial) qui a su tirer son épingle de la botte de foin !
Plus d’informations sur le projet
INTERCROPVALUES
2022-2026
Exploiter les avantages des cultures associées pour concevoir et gérer des systèmes de culture diversifiés, résilients, rentables et respectueux de l’environnement.
Pour offrir les meilleures expériences, nous utilisons des technologies telles que les cookies pour stocker et/ou accéder aux informations des appareils. Le fait de consentir à ces technologies nous permettra de traiter des données telles que le comportement de navigation ou les ID uniques sur ce site. Le fait de ne pas consentir ou de retirer son consentement peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.
Fonctionnel
Toujours activé
Le stockage ou l’accès technique est strictement nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de permettre l’utilisation d’un service spécifique explicitement demandé par l’abonné ou l’utilisateur, ou dans le seul but d’effectuer la transmission d’une communication sur un réseau de communications électroniques.
Préférences
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire dans la finalité d’intérêt légitime de stocker des préférences qui ne sont pas demandées par l’abonné ou l’utilisateur.
Statistiques
Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement à des fins statistiques.Le stockage ou l’accès technique qui est utilisé exclusivement dans des finalités statistiques anonymes. En l’absence d’une assignation à comparaître, d’une conformité volontaire de la part de votre fournisseur d’accès à internet ou d’enregistrements supplémentaires provenant d’une tierce partie, les informations stockées ou extraites à cette seule fin ne peuvent généralement pas être utilisées pour vous identifier.
Marketing
Le stockage ou l’accès technique est nécessaire pour créer des profils d’utilisateurs afin d’envoyer des publicités, ou pour suivre l’utilisateur sur un site web ou sur plusieurs sites web ayant des finalités marketing similaires.