Projet Intercropvalues : analyse croisée des cas d’études de co-innovation

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À travers 13 cas de co-innovations en Europe, le projet Intercropvalues explore comment développer des filières agroalimentaires basées sur les cultures associées. Diversité des contextes, similitudes dans les démarches, changements de cap et défis rencontrés : l’analyse intermédiaire met en lumière la richesse mais aussi la complexité de ces dynamiques collectives.

Le projet Intercropvalues s’appuie sur 13 cas d’études de co-innovations (CICS), situés un peu partout en Europe, composés d’agriculteurs (bio, conventionnels ou mixtes) et accompagnés par différentes structures (recherche, organisme de développement, coopératives, etc). Les CICS poursuivent tous l’objectif de développer une filière agroalimentaire basée sur les cultures associées, mais chacun a son propre cheminement.

Un travail d’analyse pointu

Une équipe de recherche centralise les avancées et apprentissages de l’ensemble des CICS tout au long du projet. Cette équipe à pour objectifs de soutenir et guider les pilotes de CICS avec des outils, méthodes et analyse réflexive, mais aussi d’analyser le processus de conception pour développer ces chaînes de valeur et comprendre comment elles sont rendues possibles.

La première étape de l’équipe de recherche en 2023 était de décrire les états initiaux des CICS, en détaillant les types de cultures associées étudiées, les chaînes de valeur impliquées dans chaque CICS, les motivations des groupes, le réseau d’acteurs ciblés, l’historique de collaboration, la stratégie de production de connaissances, etc. 

Une diversité de situations ambitieuses…

L’équipe de recherche a mis en lumière une grande diversité de situations dans les objectifs poursuivis par les CICS relatifs aux récoltes des cultures associées.

Certaines cultures sont associées à des plantes de service non récoltées, comme le brocoli associé à de la vesce. D’autres CICS choisissent d’associer deux plantes récoltées pour l’alimentation humaine. D’autres encore associent deux plantes récoltées, l’une pour l’alimentation humaine et l’autre pour l’alimentation animale.

La diversité de situations des CICS s’étend également à la nature des pilotes à la tête des CICS, où l’on retrouve des institutions de recherche publique, des agriculteurs, des entreprises, des structures de conseil ou de développement.

… Et des points communs

Cependant, en examinant chaque catégorie de CICS, l’équipe a également pu observer des similitudes dans les stratégies qui allaient être adoptées, les motivations ou les acteurs impliqués, parmi lesquelles :  

 Des changements de stratégie en cours de processus d’innovation

A ce panorama s’ajoutent deux approches des cultures associées qui ont été identifiées :

Au cours du projet, certains CICS ont changé leur approche ciblée pour adopter une approche exploratoire. Par exemple, notre CICS #10 en Pays de Loire est passé d’une association de cultures centrée autour de la  lentille à plusieurs autres associations (orge-pois notamment) en raison de la réalité du marché, non favorable à la lentille seule. Le CICS #7 à La Réunion est lui passé d’une association de canne à sucre avec une plante fourragère à une association de canne à sucre avec une culture récoltée pour la consommation, le voème (niébé), souhaitée par les agriculteurs.

Des défis multiples en cours de processus d’innovation…

L’équipe de recherche a identifié plusieurs catégories de CICS durant les premières années du projet Intercropvalues en fonction de différentes problématiques : 

Problématiques de tri des cultures

 

Problématiques sur la conduite des expérimentations : 

 

Problématiques sur les processus de transformation : 

 … Qui freinent les ambitions initiales

Les aléas de la vie des CICS les a parfois freinés, ou fait revoir leurs objectifs.

En France, le CICS #10 avait pour ambition de travailler sur les problématiques de tri, à partir de l’expérience d’une chaîne de tri collective qui serait installée dans une ferme pour permettre à un groupe d’agriculteurs de vendre des lentilles à la restauration collective. Malheureusement, après réflexion et examen approfondi du dispositif envisagé, l’achat du trieur envisagé n’a pas été concrétisé. Les raisons de cette décision sont notamment liées à la charge de travail que cela entraînerait pour la ferme, qui passerait du statut d’agriculteur à celui de trieur.

Au Danemark et en Suède, les CICS #1 et #2, ont connu un changement de pilote, ce qui a retardé la mise en œuvre des activités visant à atteindre leurs objectifs.

En Italie, le CICS #11 concentre ses efforts sur le terrain, à la sensibilisation des consommateurs et le lobbying auprès des autorités locales en fonction des besoins prioritaires des agriculteurs.

En Grèce enfin, le CICS #6 attend une quantité suffisante de cultures produites en mélange après une année de campagne sur le terrain insatisfaisante.

L’analyse de l’état intermédiaire (2 ans après le début du projet) montre que les CICS ont des problèmes similaires, mais leurs dynamiques et leurs progrès diffèrent. Leurs parcours sont loin d’être linéaires et clairs, les changements sont constants.

Deux enseignements et du pain sur la planche

L’équipe tire deux enseignements majeurs de cette analyse : 

Le développement d’une chaîne de valeur basée sur les cultures associées dépend fortement des agriculteurs engagés, des pilotes de projet, des marchés, des apprentissages et des ressources disponibles.

Le développement d’une chaîne de valeur basée sur les cultures associées dépend également fortement de la nature des cultures associées, des parties prenantes, de la chaîne de valeur visée et de la gouvernance du projet.

Dans la suite du projet, l’équipe analysera les différentes activités mises en place par les CICS (expérimentations, ateliers de conception, etc.), leurs résultats et les facteurs clés afin de dégager les enseignements du projet et proposer différentes pistes pour concevoir une chaîne de valeur autour des cultures associées.